Parmi les quinze résolutions que comportait le texte présenté lors de l’assemblée générale de GRDF, j’ai voté contre les deuxième et troisième résolutions.
En effet, et malheureusement sans surprise, il a été décidé de distribuer un dividende de 158 millions d’euros aux actionnaires au titre de l’année 2023. Rappelons que pour la même période, comme je l’avais indiqué dans ma lettre aux Salariés numéro 18, les comptes sociaux de GRDF enregistraient un déficit de 178 millions d’euros.
Le versement de ce dividende à la maison mère ENGIE a été réalisé le 18 juin 2024.
Tout au long de mon mandat 2024-2028, je vous communiquerai sous forme de compteur le montant total de cash remonté à la maison mère par GRDF et quelle qu’en soit la forme.
Après la présentation de la situation de l’entreprise par la directrice générale de GRDF, j’ai quitté le Conseil d’Administration.
En effet, après la suppression du régime spécial de retraites des IEG pour laquelle les décrets d’application se font toujours attendre, les négociations pour la modernisation de la grille de salaire ont donné lieu à des propositions inadmissibles de la part des employeurs. Citons par exemple leur volonté de supprimer les NR au profit de coefficients d’augmentation avec des pas de 0.1 % et un minimum d’augmentation de 1.5 %. Cela témoigne du cynisme des employeurs face aux revendications des agents pour une meilleure reconnaissance de leur travail.
Les entreprises du secteur de l’énergie rencontrent de grandes difficultés pour recruter du personnel alors
que nous aurons besoin d’un fort taux de recrutement pour faire face aux défis écologiques.
Les pouvoirs publics doivent entendre cette réalité et les employeurs doivent cesser d’aggraver ce manque d’attrait pour nos entreprises.
Les employeurs du secteur des IEG n’ont qu’un seul objectif : individualiser les salaires en supprimant les repères collectifs de progression prévus par la grille, gage d’équité.
La baisse de l’enveloppe de la masse salariale est recherchée dans cette manœuvre, mais elle ne profitera ni aux investissements, ni à la sécurisation de nos réseaux.
Une fois de plus, ces économies réalisées sur le dos des agents, qui sont ceux qui produisent les richesses et assurent quotidiennement le Service Public de l’énergie, serviront à augmenter l’enveloppe de dividendes pour les actionnaires. Toujours plus !
Au moment de la rédaction de cette lettre, les employeurs, sous la pression des agents grévistes, ont proposé de reporter cette négociation au début de l’année 2025.
Pas de participation pour le personnel en 2024 puisque le résultat est négatif en norme française.
Mais
Dividendes pour l’actionnaire en 2024 puisque le résultat est positif en norme européenne.
GRDF et la filière du biogaz attendaient avec impatience la mise en place des certificats de production de biométhane (CPB). Ceux-ci devraient permettre d’accélérer son développement sans impacter les finances publiques. Ce décret, attendu depuis deux ans, est un vecteur d’avancée majeure pour le secteur. Cela concerne notamment le projet d’entreprise ambitieux de GRDF 2024 – 2028 qui vise à multiplier par 5 la production de gaz vert, diviser par deux les émissions de nos activités et proposer des solutions pour réduire l’empreinte carbone de tous nos usagers gaz et partenaires. Ce projet d’entreprise avait pour objectif de contribuer à la lutte contre le réchauffement climatique mondial en limitant l’augmentation des températures à moins de 2°C.
Mais le Président de la République ayant décidé de dissoudre l’Assemblée Nationale, tous les projets législatifs en cours, y compris celui des CPB sont suspendus. Si le futur gouvernement décide de les présenter à la nouvelle Assemblée, le processus législatif devra reprendre depuis le début.
CPB, késako ?
Ce nouveau mécanisme introduit dans le Code de l’Energie l’obligation pour les fournisseurs de gaz de produire des certificats de production de biogaz équivalents aux volumes de gaz livrés à leurs clients finaux (résidentiels et tertiaires). Les fournisseurs ont le choix entre produire du biométhane injecté dans un réseau de gaz ou acheter des certificats de production de biogaz à des producteurs. De plus, ils peuvent se regrouper pour négocier à long terme l’achat de certificats avec des producteurs de biométhane injecté.
Dans les documents du plan triennal d’investissements 2024-2026 présentés au Conseil d’Administration, la Direction mentionne une réduction de 19 millions d’euros par rapport à 2023 pour les investissements dans les raccordements biométhane en 2024 sous réserve de l’approbation du CPB cet été (avec la possibilité d’une augmentation en 2026). Or, la crise politique actuelle rend cette approbation impossible. C’est d’autant plus regrettable qu’il est devenu urgent d’accélérer la production de gaz vert pour atteindre les objectifs de neutralité carbone d’ici 2050. Il est aussi possible que l’objectif de décarbonation en 2030 défini dans le projet d’entreprise de GRDF, ne soit pas atteint.
Fin 2023, la capacité de production de biométhane était de 12 TWh/an, soit l’équivalent de 2 réacteurs nucléaires. Pour contribuer à la décarbonation des usages du gaz et à la transition énergétique de la France, GRDF s’engage à atteindre 20% de gaz verts dans les réseaux gaziers d’ici 2030. Les gaz verts actuellement produits par méthanisation seront également générés demain par pyrogazéification, gazéification hydrothermale ou power-to-méthane. Cette capacité atteindra 60 TWh/an, ce qui équivaut à la puissance de 11 réacteurs nucléaires.
Alors qu’au 1er trimestre 2024, le solde des clients demeure négatif, s’élevant à -10 985, l’augmentation de 11,7 % du prix du gaz au 1er juillet 2024 pour des millions d’usagers intervient dans un contexte économique déjà très difficile. Cela va aggraver la précarité énergétique de nombreux ménages. De plus, un projet d’arrêté était prévu pour le 1er juillet 2024 pour mettre fin à l’application du taux réduit de TVA de 5,5 % sur les chaudières gaz à très haute performance énergétique (HPE et THPE).
Le gaz d’aujourd’hui et les solutions futures reposent sur les gaz renouvelables de deuxième et troisième générations. Le gaz renouvelable a toute sa place dans le mix énergétique de 2050, y compris dans un rôle d’amortisseur de l’électrification de certains usages et l’adaptation des infrastructures. Mais il est nécessaire de commencer à y travailler dès aujourd’hui sans tergiverser.
En effet, ses infrastructures, sa puissance et sa production seront de plus en plus locales et il sera tout aussi possible de le stocker. Cela garantit un bon niveau d’indépendance à moindre coût en vue d’une neutralité carbone en 2050.
Un Conseil d’Administration supplémentaire a été ajouté au calendrier de 2024. Il est programmé le jeudi 25 juillet 2024 pour, semble-t-il, finaliser l’ordre du jour du Conseil d’Administration du lundi 17 juin 2024.